La lettre d'Edouard Carmignac
[Management Team] [Author] Carmignac Edouard

La Lettre d'Edouard Carmignac

Tous les trimestres, Edouard Carmignac prend la plume pour commenter les enjeux économiques, politiques et sociaux du moment.

Paris, 8 juillet 2020

Madame, Monsieur,

Alors que nos économies sortent péniblement de leur léthargie, que le COVID ne s’éteint pas aux Etats-Unis et continue à faire des ravages dans nombre de pays émergents, qu’une seconde vague est redoutée cet automne conjointement à la fermeture d’entreprises fragilisées, les Bourses mondiales enregistrent semaine après semaine de nouvelles progressions.

Tout cela est-il bien raisonnable ? Les marchés sont-ils en état d’apesanteur ? Leur optimisme pourrait saluer notre entrée dans un nouveau paradigme, dicté par notre refus de l’insécurité. Dans le passé, une fois les récessions déclarées, elles étaient combattues par des politiques monétaires agressives accompagnées le plus souvent par des relances budgétaires timides. Aujourd’hui, face au risque pandémique, les économies ont été mises à l’arrêt et le risque de récession conjuré par la généralisation des taux zéros négatifs et des mesures fiscales de soutien massives. Le coût de la crise pour les pays riches est ainsi colossal : près de 10% du PIB, soit cinq à six années de croissance.

Cela est-il soutenable ? Assurément, non. Mais tant que l’explosion des dettes publiques est absorbée pour l’essentiel par les banques centrales et que la quasi-totalité des pays adoptent des politiques de soutien comparables, l’attente d’une reprise de l’activité globale devient moins anxiogène.

Pour nous, le véritable coût de cette crise est ailleurs. Notre refus de l’insécurité nous fragilise en renforçant notre dépendance auprès de l’Etat, affaiblit l’esprit entrepreneurial, et crée un revenu universel de facto. Outre le renfort de l’assistanat, la mise en avant du télétravail peut être lourde de conséquences. A partir du moment où la présence d’un collaborateur n’est plus requise, pour quoi ne pas recruter à capacité égale et à moindre coût à Marrakech ou Bangalore ? Enfin, l’implacable accélération digitale suscitée par cette crise détruit nombre d’emplois que la lenteur de notre croissance peinera à absorber. Ainsi, que deviendront nos services postaux alors que nos échanges de courrier ont été sensiblement réduits ? ….des agents de livraison d’Amazon ?

Cette analyse renforce le bien fondé de nos principaux caps de gestion, tels que je vous les énonçais dans une lettre précédente. « La priorité de notre gestion obligataire n’est plus celle de la gestion des taux mais plutôt celle des risques de crédit, tant publics que privés. La gestion des risques de change reprend ses lettres de noblesse et fait valoir notamment les attraits de l’ultime monnaie de référence, l’or. En matière de gestion des actions, cette crise renforce également les thèmes directeurs de nos choix. Nous sommes ainsi amenés à exercer en ligne une part croissante de nos activités : travail, achats, paiements, jeux, consultations médicales…. Le secteur de la santé, favorisé historiquement en tant que réservoir d’améliorations de notre espérance de vie, redevient encore plus prioritaire. Enfin, la Chine ressort grande gagnante de cette crise. Elle l’aura conjurée seule, aura remis son appareil de production en marche en un temps enviable. »

En vous souhaitant un bel été - convenablement investi - ! , je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de ma considération choisie.

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